Le mythe : Apollon et sa maitresse Koronis
Certaines vérités sont douloureuses, même pour un Dieu. L’histoire qui nous est contée concerne Apollon. Fils de Zeus, lui le dieu solaire, le représentant des arts, du chant, de la musique, et de la divination, envoya un corbeau blanc espionner sa maitresse Koronis. Bien que enceinte de lui, Koronis le trompe avec un mortel Ischys. Le corbeau de retour, confia à Apollon ce qu’il a découvert. Pris d’une colère dévastatrice, il tue Koronis, et noirci son corbeau, et telle une malédiction, les corbeaux seront désormais toujours noirs. Il y a dans ce récit, selon moi, les pièces d’un puzzle éparpillées, des fragments éparses d’un miroir sur notre intériorité.
L’analyse étymologique permet de mettre en exergue, un premier point intéressant. Le corbeau en grec se dit korōnē (κορώνη) il partage la même racine que le nom Koronis (Κορωνίς) l’amante d’Apollon. Elle porte littéralement une variante du mot corbeau en grec. Comme pour insister sur le fait, qu’ils partagent une même nature. Le corbeau est un symbole puissant de l’oiseau porteur de présages. Apollon affronte une vérité douloureuse, le couple adultérin est en quelque sorte, un magma instable enfoui au plus profond de son être. Ischys, l’amant, son nom veut dire force brute, peut-on interpréter ce mythe avec une dimension psychanalytique ? L’inconscient est une terra incognita, tel le désir complexe et imprévisible de Koronis, elle est enceinte du dieu de la beauté, de l’harmonie et pourtant elle le trompe. Koronis comme l’expression d’un chaos. Ce couple secret, dévoilé par le corbeau, n’est il pas la pure expression des forces bestiales et secrètes, tel que Freud ou bien Jung, les ont décrites ?
Se soigner c’est explorer son intériorité
Toutes ces trahisons que nous nous faisons à nous même. Ce mythe n’est il pas une invitation à regarder la vérité en face ? Pour guérir, soigner ces maux intérieurs ? Koronis est enceinte du dieu de la médecine Asclépios. Alors on peut se poser la question, la première des médecines, n’est ce pas de faire remonter les vérités refoulées ? Nos maladies ne sont elles pas, avant tout, des émotions étouffées et somatisées ? Le corbeau en devenant noir, porte la couleur qui nous indique sans équivoque, là où nous devons chercher, pour se parfaire.
On ne devient pas illuminé en s’imaginant des figures de lumière, mais en rendant conscient l’obscurité.
Jung, Collected Works, vol. 13, §335
Korone, le corbeau en grec, veut dire aussi un objet courbé, un bec et par extension il a formé Corona en latin, la couronne. La couronne, qui veut dire aussi le sommet, cette parenté étymologique renforce l’idée de perfectionnement. La capacité à écouter et accepter ces vérités douloureuses, que nos corbeaux cherchent à nous transmettre, par les rêves, les synchronicités et les rencontres et les évènements inattendus de nos vies. Les corbeaux sont noirs, pour notre salut, leur sombre plumage nous rappelle que nous avons tous, respectivement et individuellement, un travail à faire sur nous même.

